Jean-Loup Chrétien, orgue

Général de Brigade Aérienne, il est tour à tour pilote de chasse, pilote d’essais, cosmonaute et astronaute.
Il est hanté par l’orgue dès sa plus jeune enfance au point d’envisager dans les années 70 de changer de métier. Avant de rencontrer Pierre Bardon qui devient son professeur, il éprouve une grande tristesse doublée d’une profonde angoisse dès qu’il entend un orgue, à la seule idée qu’il ne touchera jamais les claviers de ce merveilleux instrument. Il y arrive enfin après avoir construit de ses mains un orgue électronique qui l’aidera à accéder à la première tribune. La seconde sera encore plus symbolique, après qu’il ait restauré avec un ami un orgue à Salon de Provence, muet depuis 1/2 siècle. Ce sera ensuite les cours à la basilique de Saint Maximin avec Pierre Bardon, l’exil à Moscou avec un orgue numérique qui sera la curiosité locale à la Cité des Étoiles, et aujourd’hui les cours au Conservatoire de Brest sous l’aile d’un professeur d’une patience infinie, Marta Gliozzi.
Il totalise plus de 13 000 heures de vol et continue à voler en tant que pilote professionnel. Premier européen à faire une sortie extravéhiculaire dans l’espace, il est aujourd’hui Vice-Président de Tietronix, société américaine associée à la NASA pour le développement de systèmes « haute technologie » destinés à divers programmes de l’Agence Spatiale américaine.
Vous connaissiez le Jean-Loup Chrétien astronaute, voici le Jean-Loup Chrétien organiste. Le premier Européen à faire une sortie extra-véhiculaire dans l’espace, a en effet une seconde passion : l’orgue.
Il s’est pas fallu de peu qu’il n’embrasse une carrière d’organiste plutôt que celle qu’on lui connait. « Les deux sont arrivés au même moment, à l’adolescence ». Il y a d’ailleurs selon lui un parallèle entre l’orgue et l’aéronautique. « J’ai réalisé récemment que l’orgue, avec toutes ses commandes, pouvait s’apparenter à une cabine de pilotage. On y est enfermé un peu comme dans un cockpit, coupé du public comme une commandant de bord est coupé de ses passagers.»
Il a réussi à conjuguer ses deux passions au travers d’un spectacle qu’il a imaginé. Il présentera “Rêves d’Etoiles” (“Gone With The Stars”) ce jeudi 8 décembre à la Methodist Research Institute de Houston. C’est la deuxième fois que ce récital-conférence est donné aux Etats-Unis. Avec son complice Jean-Philippe Le Trevou, organiste professionnel, le Français interprète, tour à tour, des pièces de musique, improvisées ou écrites, qui serviront d’illustration sonore à des projections de films spatiaux (dernières images du télescope Hubble, vols dans l’espace…). Le tout agrémenté des commentaires de l’astronaute-organiste.
« Je ne sais pas lequel des deux éléments, la musique ou les images, passe avant l’autre mais les deux fonctionnent formidablement bien ensemble, dit-il. L’orgue est un instrument d’une souplesse infinie et se marie avec n’importe quoi. C’est d’ailleurs pour cela qu’on l’appelle le roi des instruments » Un roi particulièrement adapté aux images grandioses de l’espace. « Lorsque la toute-puissance de l’orgue accompagne les images du décollage de la navette, ça marche à tous les coups » .
Jean-Loup Chrétien l’organiste fut, jeune, l’élève de Pierre Brandon à la basilique de Saint Maximin mais sa carrière de pilote le força à laisser la musique de côté. Ce n’est que ces dernières années qu’il a redécouvert l’instrument. Depuis 2014, il suit même des cours au conservatoire de Brest. Pas toujours simple à gérer sachant qu’il passe une grande partie de son temps à Houston. Il est Vice-Président de Tietronix, société américaine qui réalise 70% de ses activités avec la NASA. « Je prends mes leçons par Skype. »
Mais Jean-Loup Chrétien se dit avant tout amateur. Ce qui le rend d’ailleurs quelque peu nerveux. « Je suis beaucoup plus à l’aise aux commandes d’un Soyouz que derrière un orgue. » C’est d’ailleurs à cause de cela que lui est venue l’idée d’associer des images spatiales à son jeu. Une première représentation de “Rêves d’Etoiles” en France a été suivie par près de quinze autres représentations, dans des cathédrales ou des auditoriums, et elles ont fait salle comble à chaque fois. « Les spectateurs sont toujours très nombreux au rendez-vous. L’orgue ou les images spatiales seules n’attirent plus trop les foules mais les deux ensemble, ça marche. Les gens en ressortent très contents. »